Un tsunami de larmes

Nous sommes le 30 Aout ? Déjà ! Il est largement temps de relever le ZODIAC WRITING CHALLENGE du mois alors !!
Sous le signe du Lion, les thèmes proposés ont été nombreux : « La vieillesse », « L’eau qui se retire », « Le concert », « Hypnose », «  Premier baiser », « Marée basse », « La vague », « Le premier homme ».
J’ai choisi « L’eau qui se retire »…
Bonne lecture !

***

La table était mise. L’odeur du risotto de gambas qui mijotait doucement dans la cuisine Américaine envahissait l’espace. C’était le plat préféré de Marc. Léa l’avait préparé pour s’excuser de la dispute – la énième – qu’elle avait déclenchée le matin même avant qu’il parte travailler.
Elle agissait toujours ainsi quand elle partait en vrille et ce stratagème s’avérait efficace : les effluves du mets de prédilection de Marc semblaient être le meilleur messager pour lui faire part de ses remords et lui demander pardon.

Dès qu’il était sorti, elle s’en était voulu. Pourquoi fallait-il qu’elle insiste toujours ? Qu’elle s’énerve au point de devenir hystérique ? Comme d’habitude, elle avait passé la matinée à se culpabiliser et l’après-midi à se convaincre qu’il l’aimait assez pour la comprendre. En fin de soirée, elle en était arrivée à la conclusion que leur embrouille appartiendrait bientôt au passé : il suffisait pour cela qu’elle s’excuse et lui promette de lui laisser le temps de vouloir cet enfant qu’elle désirait tant. Ainsi, bien que consciente d’avoir été trop loin, elle n’était plus inquiète mais impatiente de le retrouver…

Pourtant, quand Marc arriva, l’assurance de Léa s’envola. Il lui parut différent. D’un calme inhabituel. D’une détermination sereine qui la troubla. Avait-il réfléchi ? Avait-il enfin changé d’avis ? Elle se dirigea vers lui en cherchant dans ses yeux un indice sur son état d’âme. Elle crut y voir des larmes retenues. Il détourna son regard. Gênés, ils s’embrassèrent furtivement. Sans un mot – et sans prendre la peine de retirer sa veste et ses chaussures – il s’affala sur le canapé en soufflant.
Il était éreinté et boirait bien un verre…

Voyant là l’opportunité d’une réconciliation, Léa ne se fit pas prier. En un clin d’œil, elle posa Whisky, glaçons, chips et cacahuètes sur la table basse du salon. Marc se servit une bonne rasade de scotch, la but d’une traite et reposa son verre.

– C’est fini ! dit-il avec lassitude.
– Oui, je vois ça ! Tu devais avoir drôlement soif ! T’en veux un autre ?
– Je veux bien oui… Mais ce n’est pas…
– Raisonnable ? Oui, c’est vrai. Mais bon, comme on dit : « Une fois n’est pas coutume » …
Tout sourire, Léa lui tendit sa boisson et plongea son regard dans le sien. Ce qu’elle y vit la fit tressaillir. Telle l’eau qui se retire pour annoncer un tsunami, les larmes de Marc avaient disparu de ses yeux bleus devenus tristes. Ce regard, elle allait s’en souvenir aussi longtemps que les paroles qu’il prononça.
– Bon, écoute moi bien Léa… J’ai pris une grande décision aujourd’hui et… Quand je te dis que c’est fini, je ne parle pas de mon verre mais… de nous deux ! J’ai bien réfléchi, tu sais. J’ai eu toute la journée pour le faire et bien d’autres occasions aussi. Ça ne peut pas marcher, tu comprends ? Tu veux un enfant maintenant. Moi, je n’en veux pas pour le moment et… Pour être tout à fait franc, je ne suis même pas sûr d’en vouloir un avec toi. Tu n’imagines même pas à quel point mon sang se glace quand je pense à l’effet que tes crises d’hystérie auraient sur un bébé ! Alors voilà… Cette fois c’est décidé : je pars.

Sans un mot de plus, il se leva, lui tourna le dos et s’en alla.

Léa voulut le retenir, mais l’annonce de la rupture eut l’effet d’un tremblement de terre. Son corps ne fut plus que secousses, le sol se déroba, elle vacilla…

Et quand la porte claqua, un tsunami de larmes la submergea.

© Jos Gonçalves le 30 aout 2019

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